Depuis le début de la guerre en Ukraine, de nombreux Français ont répondu à l’appel des associations, en envoyant de l’argent, des vivres, des vêtements, parfois même du matériel médical ou scolaire. Si la guerre semble lointaine, elle touche pourtant une corde profonde chez ces donateurs. Pourquoi donnent-ils ? Par solidarité ? Par peur ? Par culpabilité ? Peut-être un peu tout cela à la fois.
Un choc émotionnel immédiat, suivi d’un engagement durable
Quand les premières images des bombardements de Kyiv ou de Marioupol ont inondé les écrans, l’émotion fut collective. Le visage d’enfants hagards dans des sous-sols, les files de réfugiés sous la neige, les femmes âgées tirant des valises sur les routes gelées… ont ému bien au-delà des cercles militants.
« Je n’avais jamais donné à une cause internationale avant. Mais là, c’était trop. J’ai vu une vidéo d’un hôpital pour enfants touché par une frappe. Je me suis mis à pleurer. J’ai cliqué pour donner. C’était instinctif. »
— Émilie, 28 ans, bibliothécaire à Angers.
Pour d’autres, ce premier choc s’est transformé en une action régulière. Un virement mensuel. Une cagnotte au travail. Une collecte au sein de l’école. Ces gestes deviennent des rituels. Presque une forme de résistance symbolique.
L’Histoire qui revient, et la mémoire française en éveil
Chez certaines personnes âgées, c’est la mémoire de la Seconde Guerre mondiale qui ressurgit.
« Quand j’ai vu les colonnes de chars russes entrer en Ukraine, j’ai pensé à 1940. À ce que mon père me racontait de l’Occupation. On a oublié trop vite ce que c’est que la guerre sur notre sol. Ça m’a glacé. J’ai voulu aider. » — Gérard, 73 ans, ancien instituteur à Lille.
Cette mémoire réveille un devoir moral, un refus du cynisme. Elle ancre aussi le conflit dans une continuité européenne : ce qui se joue en Ukraine, ce n’est pas seulement le destin d’un pays, c’est celui du continent.
L’angoisse d’un monde qui se délite
Beaucoup de donateurs ne sont ni politisés, ni experts en relations internationales. Mais tous ressentent un malaise diffus : le monde semble vaciller. Pandémie, guerre, crise climatique… L’Ukraine cristallise une peur plus large, celle d’un effondrement de l’ordre établi.
« Ce qui me fait peur, c’est qu’on s’habitue. À la guerre. Aux massacres. Aux réfugiés. Donner, c’est ma façon de dire : non, je ne m’habitue pas. » — Fatou, 35 ans, aide-soignante en Seine-Saint-Denis.
Donner devient alors un geste de réassurance morale, presque thérapeutique. Une manière de ne pas se laisser engloutir par l’impuissance.
L’incompréhension face à la lenteur des politiques
Certains donateurs expriment aussi une colère sourde envers les institutions internationales ou l’Union européenne. Ils trouvent les réponses trop lentes, les discours trop prudents.
« J’entends qu’il ne faut pas “provoquer” la Russie. Mais pendant ce temps, des gens meurent. Moi, je ne peux pas attendre les grandes conférences diplomatiques. Alors je donne. » — Julie, 42 ans, architecte à Toulouse.
Pour ces Français, le soutien humanitaire devient une forme d’action politique citoyenne. Ce n’est pas un vote, mais c’est un acte. Un acte qui affirme une position : le soutien à une démocratie attaquée par une dictature.
Un engagement sans drapeau, mais pas sans conviction
Ce mouvement de dons n’est pas partisan. On y trouve des personnes de toutes classes sociales, croyances et générations. Beaucoup n’ont jamais milité. Mais ils partagent une même conviction : l’indifférence n’est plus possible.
« Je ne suis pas militante. Je ne suis même pas sûre de comprendre tous les enjeux. Mais je sais ce que je ressens quand je vois cette guerre. Et ce que je ressens, c’est une révolte. » — Nathalie, 54 ans, pharmacienne à Dijon.
Conclusion : un peuple de citoyens sensibles, parfois inquiets, mais pas indifférents
Les Français qui donnent pour l’Ukraine ne cherchent pas à se faire remarquer. Ils n’agissent pas pour la gloire. Mais leur geste a du poids. Ils disent quelque chose de la France : une société où l’on peut encore être touché par la souffrance d’autrui. Où la peur ne tue pas toujours l’action. Où, face à l’horreur, on peut encore tendre la main.
Merci à vous tous!
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